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Réflexions et débats


Politique et JdR

[Débat] JdR et engagement

Olivier Grima C'est en voyant les dégâts occasionnés par la marée noire du Grobatopabô (pétrolier Erika) que j'ai eu envie de rejouer à Blue Planet. Et là, un tilt s'est effectué.

Le tilt s'est amplifié lorsque j'ai eu l'occasion de visiter un site qui propose un JdR, Los Temps dels Trobadores, < http://perso.infonie.fr/giannieanna/tdt/ > en langue d'oc.

Utiliser le JdR comme vecteur d'une certaine conception de la vie ou d'un engagement politique (dans le sens le moins péjoratif du mot) n'est certes pas nouveau mais est-ce que cela fonctionne ?

Est-ce que vous vous sentez sensibiliser ou interpeller par de tels 'messages' ?
Dans quelle mesure ce genre de jeu vous intéresse, au cas où vous ne reniez tout simplement pas leur existence ?
Y jouez-vous uniquement pour vous amuser ou y trouvez-vous une quelconque réflexion ?
Est-ce que ce que je vous dis vous semble dénué de sens commun OU vous semble-je supra-intelligent de vous proposer un tel débat ? :0)

[Certes Le JdR est avant tout ludique et non ludo-éducatif] Ben ouais mais j'aurais bien voulu qu'on me fasse jouer au JdR pour m'apprendre l'Histoire !

Je vous demande juste si parfois vous réfléchissez aux idées qui sont distillées dans les JdR. Et ce n'est pas l'avis de profs ou d'éco-guerriers qui m'intéressent, mais l'avis de joueurs de JdR. 
Je vais tenter de t'expliquer mon point de vue par un autre média culturel que le JdR : les romans d'anticipation. Que de théories scientifiques, concepts philosophiques ou idéologies politiques égrenés dans certains de ces bouquins. Et pourtant, c'est du loisir, du plaisir. 

Exemple : Babylon Babies de Maurice G. Dantec, roman par ailleurs fort divertissant et qui utilise, notamment, la théorie anthropologique très sérieuse du Réseau Global de Vie (exposée dans le Serpent Cosmique que je vous recommande...). 
Ainsi que les dernières nouveautés en matière de sciences cognitives. Avec tout ce que cela implique en matière de philo et de politique.

Maintenant, replaçons-nous dans les JdR. Moi aussi je m'amuse et, comme je l'indique, j'ai pris vraiment conscience de cela il y a peu (si tant que je sois dans le vrai). Mais quand on adapte une oeuvre littéraire en JdR (comme Cyberpunk 2020), les concepts sont nécessairement transportés.

MAIS, tout comme ces oeuvres littéraires, il est parfaitement possible de nier tout cela et de simplement s'amuser !
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Le Cygne

Le débat que tu as lancé est loin d'être sans intérêt, il suffit de voir la quantité de réactions que cela suscite...
Pour en revenir au sujet, j'ai dans le cadre de mes études écrit un petit mémoire sur le jeu de rôle ludique, or voici ce que j'y avais écrit concernant jeu de rôle et éducation :

"Si le jeu est frivole dans l'esprit de beaucoup cela ne veut pas dire pour autant qu'il est inutile. Gilles Brougères dans "jeu et éducation" écrivait : "si nous reprenons les critères qui nous permettent de définir la spécificité du jeu, leur apport éducatif peut apparaître comme probable... " 
Bref j'abrège, le jeu est reconnu depuis longtemps comme un moyen d'autoéducation...

Par conséquent que l'on crée des jeux à dimension historique, politique, sociale, etc. C'est en quelque sorte un paradoxe puisque c'est inhérent aux jeux que de faire découvrir ces aspects de la société... Cela n'empêche pas d'y réfléchir mais est ce bien là le but premier ???

Pour conclure et te montrer que globalement nous sommes sur la même longueur
d'onde, voici la conclusion de mon mémoire :

Le jeu de rôle est un jeu de société qui se pratique comme tel, avec pour seul aboutissement souhaité : l'amusement en suivant des règles.
Ainsi, c'est un moyen d'expérimentation, comme le dit un joueur interrogé :
"le jeu reproduit fictivement un microsociété et permet de mieux appréhender
la société. "
De par les thèmes qu'il aborde c'est également un vecteur culturel, "témoin" de la mémoire collective de l'humanité et de son imaginaire. 
C'est par ses spécificités un complément de l'éducation scolaire, pouvant même relancer l'intérêt pour cette dernière.
Enfin pour terminer c'est un loisir socialisant car il permet d'appréhender la société et d'expérimenter le collectif au sein d'un groupe restreint. "


Enfin bref, c'est un peu enveloppé comme discours mais globalement j'essayais de prouver à mon tuteur de mémoire que non le JdR n'était pas ce que Mireille Dumas en a montré...
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De: Gianni

Los Temps dels Trobadores, en langue d'oc.

Puisque mon jeu est en cause, voici sa genèse :

En 1996 je fus atteint d'une allergie profonde vis-a-vis des jeux dégoulinants de jets de dés dans tous les sens (je jouais surtout a AD&D et a SW) et me mis donc en tête de créer mes propres règles.

J'évoluai assez vite vers une optique "jeu sans dés" mais craignant que le système n'effarouchât les joueurs (beaucoup de joueurs n'aiment pas le diceless, ils ont l'impression d'être manoeuvrés par le Maiiitre), j'y ajoutai une petite louche de cartes (influencé par la mode ?)

J'obtins ainsi un système ma foi fort convenable (avec le recul je dirais même excellent mais bon je suis pas la pour me vanter). 
L'absence de règles pour la magie excluait d'emblée le fantastique, et mon absence de temps pour créer un background cohérent excluait le monde créé de toutes pièces.

Je m'orientais donc logiquement vers un jeu de rôle historique (en plus j'ai toujours beaucoup aimé l'Histoire).
Je cherchai donc une époque qui me fut assez familière et, après avoir hésité entre l'Egypte ancienne et le 13me siècle, j'optai pour ce dernier.
Il me vint naturellement de rédiger le jeu en occitan pour donner un "look and feel" d'époque.
La France étant ce qu'elle est, le simple fait d'avoir créé un JdR en occitan est déjà en soi un acte politique, mais ce n'était pas l'intention originelle.

Engagez-vous, rengagez-vous...

Olivier Grima: Utiliser le JdR comme vecteur d'une certaine conception de la vie ou d'un engagement politique (dans le sens le moins péjoratif du mot) n'est certes pas nouveau mais est-ce que cela fonctionne ? Est-ce que vous vous sentez sensibilisés ou interpellés par de tels 'messages' ?

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JF Seignol

C'est une question qui me turlupine beaucoup. Je crois en effet que, comme toute autre forme d'art, le JdR peut être "engagé".
En effet, le JdR, c'est avant tout un moyen de raconter une histoire. Il n'est donc pas impossible, loin de là, de mettre du "fond" dans cette histoire, une morale (à prendre au sens large), ou de glisser quelques références à "la vraie vie".
De plus, davantage que d'autres techniques de narration comme le roman ou le cinéma, le JdR devrait être particulièrement apte à faire réfléchir ses pratiquants sur des questions de politique ou de philosophie : si le scénario est prévu pour poser une "question" d'ordre général (pour reprendre l'exemple de l'Erika, les intérêts commerciaux doivent-ils s'imposer devant les considérations écologiques ?), ce n'est pas à l'auteur de l'histoire d'y répondre (comme le fait un cinéaste ou un romancier), mais aux joueurs. Non seulement le JdR leur présente des problématiques politiques ou philosophiques, mais il les pousse à chercher des réponses par l'intermédiaire de leurs persos.
Pour ma part, je n'ai jamais construit un scénario à partir d'un motif "engagé", mais j'essaie parfois de glisser dans mes parties mes convictions (ou mes interrogations) politiques ou philosophiques... Ça ne marche pas à tous les coups !

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Elgir Le PI <?>

Pour ma part je pense que si on veut faire passer quelque chose , le mieux est d'essayer de faire passer une question et de surtout de laisser les joueurs répondre (même si je ne peux me retenir de les influencer). La plupart des scénariis que je fais sont donc basés sur telle ou telle question (qui n'ont pas besoin d'être compliquées). Genre le dernier scénario (c'est un thème archiclassique): qu'est ce que la réalité (scénar bourré de ravnos:).

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