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Critique
de jeu : Agone
par Kamel
SENNI kamelsenni chez gmail point com. (c) 12/99
Agone
est un jeu de rôle français, édité par MultiSim, basé sur le Cycle des royaumes
crépusculaires de Mathieu Gaborit. Ce cycle de romans décrit les aventures
d’Agone de Rochronde dans un univers de Fantasy, sa découverte d’un complot
gigantesque et la manière dont son destin fait évoluer la guerre entre les Porteurs
de la Flamme et le Masque, Incarnation des Ténèbres qui se tapissent au fond
de chacun. Agone, le jeu de rôle, vous propose d’être un de ces Mille et un
Inspirés, Porteurs de la Flamme, et de lutter contre les Forces du Masque et
de l’Ombre.
Le
jeu est présenté sous la forme d’un seul livre épais (300 pages), sous couverture
rigide. Il comporte quatre parties :
- La présentation
de l’Harmonde, l’univers de jeu, de son histoire et de sa cosmologie.
- La création
de personnages qui regroupe les règles pour ce faire mais donne également
les informations que les joueurs sont censés connaître (pas moins et guère
plus).
- Le système
de simulation et les règles sur les Magies.
- Le dernier
livret présente les Forces du " Mal "( c’est un peu plus
fin que cela), qui guettent les PJ (dans tous les sens du terme. cf. infra),
décrit en détail la Baronnie de Rochronde, dont Agone est originaire, et fournit
un scénario.
Je ne vous livrerai pas un résumé de l’univers de jeu,
ni du système de règles, mais je voudrais plutôt relever certains points originaux :
- Les
PJs sont (relativement) puissants ; ils sont âgés (30 à 40 ans) et sont
parfois très bons dans leur domaine de prédilection. C’est un parti pris des
auteurs. Les personnages sont censés être des Héros et le système de création
favorise cela.
- La Magie
est complexe et présente plusieurs voies :
L’Emprise permet d’utiliser de petites créatures magiques appelées Danseurs
(vous pouvez en voir un sur la couverture), qui dansent pour le Mage qui les
contrôle, et lui permettent de lancer des sortilèges.
La Magie des Arts est basée sur un des quatre Arts majeurs (Poésie, Sculpture,
Musique et Peinture). En utilisant des œuvres déjà rédigées (des sorts déjà
écrits), ou en inventant de nouveau, à l’inspiration (un peu comme dans Mage
ou Ars Magica), l’Artiste peut influer sur la réalité, dans les limites
du domaine de l’Art choisi (ex : La Geste, Art Magique de la Poésie, a
pour domaine le Temps et son écoulement).
On peut regretter le petit nombre de sorts proposés (moins de 10 par Arts).
- Les
Races non-humaines sont nombreuses, certaines originales (la fée noire), d’autres
très classiques (le Nain). Toutes ne sont pas réellement jouables en tant
que PJ (le géant de 4,5m de haut paraîtrait quelque peu…déplacé).
- Enfin
un jeu sans elfes ! ! !
Je
pourrais conclure en disant que c’est un jeu médiéval fantastique assez sympathique,
avec quelques originalités et un système de jeu agréable…
Mais ce serait oublier l’ambiance particulière de l’Harmonde et les inspirations
que les romans, comme le jeu, ont utilisé, consciemment ou non : Schuiten
et Peters (les Cités Obscures), Brussolo, sont les premiers noms qui
me sont venus à l’esprit. L’ambiance, baroque et sombre, les intrigues, conspirations
et passions entrelacées, la Magie, faite d’Art et de mystère, me paraissent
démarquer le jeu suffisamment pour en faire un jeu différent.
Quant aux inspirations rôlistiques, j’aurai peine à les citer tant la liste
est longue : RuneQuest (les créatures habituellement monstrueuses
considérées comme des êtres intelligents), l’Appel de Cthulhu (les forces
innommables qui se cachent dans l’ombre), Vampire (la Corruption et la
Perfidie qui peuvent transformer chaque PJ en Damné), BirthRight (la
gestion d’un domaine et la classe sociale des PJs au départ), Pendragon (certaines
rencontres féeriques)…
Quant au système de simulation, il est efficace et souple. La Création d’un
personnage peut être soit très rapide (choix parmi une douzaine d’archétypes),
soit longue et " optimisable "(points à répartir, avantages
et défauts, qui constituent un jeu dans le jeu).
Les règles de combats sont claires et fines (règles optionnelles sur des bottes,
comme le Coup de Jarnac). L’équilibre entre les types de PJ est respecté et
on s’amuse autant à jouer une fée noire adepte de l’Emprise, qu’un Ogre mercenaire.
Agone s’est extrêmement bien vendu et les auteurs prévoient une série
de suppléments, notamment sur la gestion des domaines, la magie, les contrées
des royaumes et une campagne pour l’an prochain.
Une
dernière fois, Agone est-il un bon jeu ?
Eh
bien, cela dépend ! Si on le prend comme un médiéval fantastique comme
les autres, cela restera un médiéval fantastique comme les autres.
Si, au contraire, le MJ place les joueurs au sein d’une intrigue complexe, utilisant
à fond la spécificité de la cosmologie, avec force description de Cités fabuleuses
et de créatures mythiques, baignant le tout dans une atmosphère de déchéance
et d’espoir, naviguant sans cesse entre l’ombre et la lumière, si les joueurs
ayant le poids de l’Harmonde sur les épaules, se comportent en Faramir,
Conan,
ou…Agone, alors vos parties seront plus que mémorables.
Que
les Danseurs Volent pour vous ! Et que le Drame commence...
Agone,
édité par MultiSim, 270 francs. Déjà disponible: l’écran.
décembre
1999 (c) Kamel
SENNI
Le
Cycle des Crépusculaires de
Mathieu Gaborit
par Kamel
SENNI kamelsenni chez gmail point com février
2000 (c)
Cette
trilogie (Souffre-Jour / Les Danseurs de Lorgol / Agone) décrit les
aventures d’Agone de Rochronde, et son ascension au sein de la noblesse
Urguemande,
l’un des Royaumes Crépusculaires.
Agone est un jeune prêtre Itinérant de Préceptorale, collège de moines humanistes
qui prône l’enseignement de l’écriture aux paysans. Il est rappelé auprès de
la dépouille de son père, Baron de Rochronde, pour écouter son testament, lui
qui a refusé d’être le nouveau Baron. Son père l’envoie au sein du
Souffre-Jour,
collège mystérieux, qui forme les éminences grises, maîtres espions et diplomates.
C’est pour Agone, le début d’aventures qui vont l’amener à déjouer les plans
d’un farfadet magicien, de sorciers obscurs, et le transformer en un Mage -
Musicien sans pitié, à la tête du Royaume.
Ses compagnons d’aventures seront un nain, un ogre, une Chorégraphe, magicienne
qui utilise plusieurs Danseurs (ces petites créatures dont la danse permet de
lancer des sorts), une rapière dotée d’une âme, et une fée noire, mère de gargouilles
de pierre.
Le Cycle des Crépusculaires est à la croisée des genres de la fantasy :
à la fois roman d’aventures, roman initiatique, roman d’intrigues et de complots,
de découverte d’un univers baroque, original et à mi-chemin entre la décadence
et la barbarie.
Les personnages sont fouillés et subissent une évolution intéressante au cours
du cycle : le jeune Agone, torturé par son passé adolescent, durant lequel
son père l’obligeait à pourchasser les mendiants de Lorgol, devient Agone l’homme,
qui a accepté ses fautes, et comprend l’obligation d’être dur, voire inhumain,
dans un univers rude voire... inhumain.
Les descriptions de lieux fabuleux (Les Milles Tours de Lorgol ; la Chapelle
perdue au milieu des Marais) sont riches et visuelles.
Le rythme est très varié, voire inégal, selon les romans. Souffre-Jour
est le plus lent. Quasi huis-clos, il narre l’initiation d’Agone à la magie
de l’Accord, magie basée sur la musique. S’installe une étrange ambiance, assez
feutrée et mystérieuse, que vient à peine rompre les quelques emballements du
récit, d’ailleurs largement entrecoupé par les moments de doutes d’Agone.
Les Danseurs de Lorgol est plus nerveux. Il décrit le complot fomenté
par Lerschwin, mage Farfadet de l’Eclipse, pour annihiler ses compagnons magiciens.
Agone y apprend la magie, et renoue avec son passé sulfureux.
Agone conclue avec brio le cycle, avec l’invasion d’Urguemand par le
royaume voisin de Janrénie, et les premières exactions de la Province Liturgique,
théocratie totalitaire, où domine une Inquisition aussi efficace que cruelle.
Agone y déjoue les plans de plusieurs Obscurantistes, ces magiciens dévoyés
qui torturent, voire tuent les Danseurs. Il rencontre également, pour la première
fois, les musiciens du Faux-Accord, et déjouent leurs intrigues. Il va de soi
que pour Agone, déjouer des plans, des intrigues ou des complots signifie en
règle générale, éliminer les conspirateurs de manière définitive.
Agone montre dans ce roman éponyme une absence de pitié assez choquante. C’est
peut-être le seul aspect qui me gène dans ce cycle : l’aspect assez sombre,
à la limite du dark ou du gothique (dans tous les mauvais sens du terme), de
certains personnages. Les tortures des Danseurs, voire leur sacrifice, sont
évoquées de manière très crue et provoquent, en tout cas chez moi, un sentiment
de malaise assez désagréable.
En définitive, le cycle des Crépusculaires est très plaisant à lire, et mérite
réellement le détour. Il est à noter que ces romans font l’objet d’un Jeu de
Rôle, sorti récemment, dont vous avez pu lire tout le bien que j’en pense plus
haut. L’action de ce jeu se déroule une cinquantaine
d’années après la période d’Agone, ce qui permet de garder intact la plupart
des secrets de l’univers. D’ailleurs, le jeu va plus loin que les romans, et
explique de manière détaillée des éléments historiques et de cosmogonie qui
ne sont pas présentés dans les romans.
Le Cycle des Crépusculaires, Mathieu Gaborit, Editions Mnémos
Isidore
Ducasse, Harmoniste du Geste
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