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S'investir est-il dangereux?

Témoignages

overdrive a écrit : 
habitué à m'investir dans mon personnage, pas au point de me jeter sous un train si il lui arrive quelque chose, mais assez tout de même pour frémir quand il risque sa vie, j'aimerais savoir si d'autres personnes comme moi aiment à mettre une partie d'eux-mêmes dans leurs persos ? et si oui jusqu'à quel point ?

Post-It

L'expérience la plus poussée dont j'ai été témoin et acteur est la suivante :
Un de mes joueurs de son propre aveu s'est entiché, via son personnage, d'un PNJ féminin. Au départ roleplay, son attachement est devenu fantasme personnel, au point qu'il en a parlé pendant de nombreuses années comme de sa femme idéale et qu'il se souvient de son visage (une illustration très sympa, ça aide) comme de celui d'une connaissance réelle...

Détails :

A la sortie de Star Wars en français j'ai démarré une campagne à ce jeu mais dans un univers plus proche de Jack Vance (l'Oeucumène : "Tschaï", "les Princes Démons", ...) et quelques emprunts à d'autres jeux/univers.

J'ai basé ma trame scénaristique sur les PNJ principaux (le grand ennemi invincible ayant des origines mystérieuses qui recelaient son talon d'Achille, la "garce" alliée des PJ qui les manipule pour atteindre ses objectifs, des PNJ pourris ennemis des PJ qui se font descendre par on ne sait qui (ça c'est pire que tout pour un joueur, lui retirer la satisfaction d'une vengeance, gggrrrr), etc...), ainsi que sur le background de chacun des joueurs (au départ un petit groupe, au bout de trois mois deux, puis trois équipes différentes soit une quinzaine de joueurs que je voyais différents soirs de la semaine, chassés-croisés mémorables).

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Oui j'ai bien écrit: je m'appuie sur le background des joueurs... ainsi que leur passé et leur personnalité. J'avais cherché à coller le plus possible aux goûts (films, romans ou BD préférés) et particularités de chacun d'entre eux (traits de caractère, enfance, phobies personnelles, histoires amoureuses, etc.) pour pouvoir obtenir certaines réactions de leur part. 
Bien entendu il me fallait pour cela très bien les connaître (amis de long date pour la plupart, c'était relativement aisé). Par contre, bien que je pensais devoir rester subtil pour qu'ils n'aperçoivent pas mes emprunts à leur propre vie, j'ai pu grossir au fur et à mesure mes ficelles sans qu'ils remarquent les subterfuges.

Cette campagne est restée pour les joueurs principaux comme la meilleure qu'ils aient joué, je pense qu'une part non négligeable de leur plaisir venait de cette particularité.
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Deux des PJ étaient épris au départ de la même femme (la "garce"), qui s'est amusée à les faire tourner en bourrique tout le long de plusieurs scénars (soit une 30aine de séances). L'un d'eux devint son amant, et pour des raisons bassement matérielles, elle réussit à manipuler les PJ au point qu'ils finissent par se massacrer entre eux (tour de force, mes joueurs de l'époque marchant plus à l'esprit de groupe qu'à l'individualisme).

Autre passage marquant, l'amant devenu mari et père d'un enfant, sa femme (toujours la même) le quitte car elle en a marre de la vie casanière. 
Elle s'en va avec, ce qu'il apprendra par la suite, un chasseur de primes (PNJ) vieil ennemi et emmerdeur notoire du mari.
Plusieurs séances plus tard, le mari cocufié, le chasseur de primes et le grand ennemi se retrouvent en face à face prêts à se trucider les uns les autres (façon Sergio Leone : "Le Bon, la Brute et le Truand"). Après le débarquement des trois équipes de joueurs autour de la plus grosse table que j'ai eu le privilège d'avoir, de plusieurs camps adverses, d'un combat cataclysmique de titans, de retournements de veste de dernière minute, de morts à la pelle de part et d'autre, et de moultes révélations, le mari et le chasseur de primes se retrouvèrent dans une taverne comme cul et chemise à se boire des pintes en se tapant sur l'épaule et en râlant sur leur femme commune...

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Comme quoi la profondeur des PNJ est une des clefs pour obtenir des parties jubilatoires. Mais bien sûr cela ne sert presque à rien si les joueurs ne font pas comme toi : rendre attachants leurs personnages par un roleplay inoubliable ...

Et même si je prêche des convertis, p'tain de m...! :
VIVA EL JUEGO DE ROL !!! ... Y VIVA LA TEQUILA !!! :-)))

(p'tain ce que ça fait du bien de crier un coup dans le monde du silence)

Epilogue: [Pour rassurer le monde, j'ajoute que ] en tout cas le joueur se souvient très bien de son fantasme rôliste mais il ne prends pas de cachets pour l'oublier. Il a achevé avec succès ses études, à trouvé un très bon boulot, puis a fini par rencontrer une belle demoiselle avec qui il s'est marié (elle détestait le JdR ... mais bon on ne peut pas tout avoir dans la vie ;-)).

>> N'empêche, on rigole, mais un PJ féminin (tenue par une joueuse) dans une partie de Chimère que je masterisais a vu lors d'un scénario un homme dont elle était en train de tomber amoureuse mourir, et même la  joueuse avait les larmes aux yeux.

Ashura : Ben si le MJ décrivait bien la chose, et la joueuse était vraiment dans ce trip-la...

Guillaume J : Perso, bien entendu dans mon ignorance complète du contexte, j'ai tendance a trouver ça malsain/dangereux.

Je me base pour ça sur un cas similaire (mais non semblable), ou le joueur voit mourir une PNJ dont son perso (en théorie) était amoureux (en théorie, car c'était sans doute le joueur, plutôt que le perso, l'amoureux), et qui n'en dort pas de la nuit, et écrit une lettre de protestation au MJ. Tu rajoute ça à un certain nombre d'autres manifestations inquiétantes (se promène toujours avec sa feuille de personnage, néglige ses études pour le jdr, des problèmes psychologiques plus ou moins graves etc..), et tu obtiens un MJ qui se demande s'il doit prendre la responsabilité de continuer a le faire jouer.

Mais bon, je ne sais pas si ça s'applique exactement au cas ci-dessus.

bullet

Jean-Francois Doyon

Comme quelqu'un d'autre l'a déjà dit, la personnification est l'essence même du jeu de rôle.
Rien n'est plus ennuyant qu'une partie de jeu de rôle qui se limiterait à une partie de WTAKE (Walk Thru And Kill Everybody).
En tant que joueur et MJ, j'avoue que mes personnages (PNJ comme PJ) portent toujours une partie de moi, et quand je suis le MJ, j'en espère toujours autant de mes joueurs. Rien de tel que des joueurs qui surprennent le DM autant que le DM peut surprendre les joueurs. Exemple comique :

Pour "présenter" le jeu à un joueur (c'était sa première partie, ou presque), je lui avait fait jouer une partie solo qui s'apparente, en fait, à un WTAKE, histoire de ne pas trop le mêler ou le décourager. L'idée était simple: s'introduire dans un donjon, avec l'aide d'un PNJ, occire les orcs et les gobelins sur la route et piquer une pierre magique.
Or, je n'avais pas prévu que ce joueur désirerait apprendre l'orc comme l'une de ses langues secondaires. Alors dès qu'il est arrivé devant un garde orc, il l'a persuadé de le mener au sommet de la tour devant son chef afin de troquer la pierre. Le PNJ devrait rester en garantie. Une fois dehors, le joueur (un nécro) a jeté le sortilège "feuille morte" sur le PNJ, lequel a pu se jeter par la fenêtre sans mal. Finalement, ce qui devait être une partie de combat s'est résumé deux ou trois victimes et des cases "points de vie" à peines raturés!

C'est ce qui rend une partie ennuyante ou intéressante, selon moi: le niveau de l'implication des joueurs et du DM dans leurs personnages. Si les joueurs, acceptent ou même créent des side stories, ni le Dm, ni les joueurs ne sauront où la partie mènera. Le DM pourra alors jeter ses papiers en l'air et s'amuser autant que ses joueurs!

Blueblade

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