DE L’ANIMATION A LA SIMULATION 4ème partiepar Shinji Ikari " Espace, frontière de l'infini... " Mais qu'est ce que je fais ? Vous voulez bien me le dire ? Je révèle le sujet de mon article en première ligne. Ca va pas non ? Bon, plus sérieusement, j'aimerais vous parler de ce thème (disons plutôt sujet pour ne pas que vous preniez votre aspirine tout de suite) qui est plus récurrent dans les dessins animés et les mangas que dans n'importe quelle autre forme d'art. Et là, tout de suite, vous vous retrouvez en terrain connu. Des noms vous viennent immédiatement à l'esprit. Ainsi à l'énonciation du mot " espace ", les plus anciens me rétorqueront immédiatement un nom mythique : Albator. Mais cela est loin d'être tout, les fans de Buck Rodgers, série archétype à trois francs six sous avec une bande originale digne de Pascal Obispo, me diront que leur série préférée est Capitaine Flam. Pour nos amis quelque peu portés sur le sexe, nous avons ce qu'il faut en magasin : Cobra. J'en passe et des meilleurs. Bon, ne nous éparpillons pas et réfléchissons un peu entre deux scénars politiques. Là vous me voyez venir à des années-lumière, je vais vous dire qu'il y a plusieurs sortes de mangas qui ont pour dénominateur commun l'espace. Vous avez raison. Vous pensez probablement que mon adhésion aux principes de la Poétique d'Aristote et mon passé de sorbonnard vont me dicter un plan en trois parties. Encore une fois, vous ne vous trompez pas. Je vais vous dire ceci : il existe trois grandes catégories de Space Opera manga : ceux de droite, ceux de gauche et ceux qui ne sont ni l'un ni l'autre. Vous ne me croyez pas ? Lisez donc la suite. Qui plus est, je finis ce paragraphe comme je l'ai commencé, par la politique. A ma droite, vous voyez les ténors de type Star Wars (et oui, George Lucas est probablement de droite, je l'expliquerai ci-dessous), comme Albator, Galaxy Express 1999, et Flash Gordon. A ma gauche, les défenseurs de l'ordre et de la justice intersidérale : Macross et Macross+, Capitaine Flam et, dans une moindre mesure, Cobra. Enfin, il y a ceux qui ne donnent aucune vision politique comme La Guerre des Planètes et Ulysse 31. Je vous ai peut-être désarçonné tout à l'heure en disant que Lucas est de droite. Et bien oui ! En effet, la vision qu'il nous donne du gouvernement à travers l'Empire (ce nom convient pour nommer tous les régimes qui sont centralisés, autocratiques et envahisseurs) correspond au libéralisme quasi anarchiste tel que le prônent les libéraux du XVIIIème siècle comme Adam Smith et Ricardo : " laissez faire, laissez aller ". La droite libérale pense que l'Etat est néfaste, il restreint la liberté et tend vers la dictature, d'où la légitimation de la Rébellion. C'est le cas pour Albator 78 et Albator 84 qui retracent l'épopée d'un capitaine pirate combattant pour la liberté dans l'univers. Dans les premiers épisodes, il s'attaque avec son équipage aux Sylphides, des femmes longilignes. Après avoir triomphé de la dernière, dans un combat à l'épée-blaster des plus mémorables, il combattra les dictatures, à travers divers mondes. Ces dits mondes et les extra-terrestres sont des allusions permanentes à l'univers de Star Wars. Et quand on pense que les ancêtres d'Albator et son quartier-maître sont des anciens résistants de la seconde guerre mondiale, nous sommes certains de l'influence que Lucas a eu sur la série. A part ça, on notera que le vaisseau fait baver tous les rôlistes par son arsenal (il ressemble aux porte-avions japonais qui ont débarqué en Chine). Ceux qui ont lu les articles précédents se souviendront que le thème de l'Empire qui envahit n'est pas nouveau (il s'agit des ricains). Autre sujet qui a construit la réputation d'Albator (non je ne parlerai pas de sa balafre) : c'est son amour de toujours, Nausicaa. Cette rousse a fait fantasmer bon nombre d'entre nous par sa beauté et par son courage. Mais vous savez compter les années comme moi et vous avez conclu que cette série date et que je vais dans les prochaines lignes en dire du mal. C'est vrai. Par exemple, prenons le combat spatial. Il est resté au stade Star Wars. Les vaisseaux explosent en faisant du bruit et, dès le générique, le spectateur apprend que les explosions sont multicolores. L'effet est aussi facile que celui du bruit insoutenable des moteurs des chasseurs TIE. Les intrigues sont à l'état de vestiges et souvent la personnalité des protagonistes, autre que celle d'Albator, son quartier maître et Nausicaa, n'est pas très fouillée. Bref cet ancêtre des Macross et autres, est un précurseur mythique et doit être respecté pour cela d'autant plus que les pirates de l'espace ne sont pas ce qui manque dans n'importe quel univers de JdR Space Opera. J'aborde maintenant une série dérivée d'Albator : Galaxy Express 1999. Ce dessin animé date de 1986 et raconte l'histoire d'une jeune femme de bonne famille qui accepte de voyager avec un jeune pré-pubère ; ce dernier doit traverser la galaxie par le Galaxy Express (un train intersidéral) pour acquérir son corps parfait de cyborg. Et là, vous me ressortez un terme que vous avez déjà lu dans cette rubrique : Bildungs Roman. Vous avez alors le droit de me dire " Ah oui ! Corps de cyborg, corps parfait... bla, bla, adolescence et puberté etc. " Décidément, vous faites de rapides progrès, vous ne voulez pas finir à ma place ? Non, ce qui est semblable à Albator dans cette série est la vision de l'autorité : le chef de gare. C'est un robot incompétent mais possédant du coeur. Ainsi, l'autorité que devrait exercer ce " fonctionnaire " est perpétuellement remise en cause (voire usurpée) par nos deux héros. Les mondes qu'ils traversent et dans lesquels ils règlent des problèmes sont, à part quelques exceptions, des mondes où la résistance (revoilà Star Wars) est toujours du bon côté. Pour défendre cette série, nous pouvons dire que la jeune femme (qui est habillée à la mode russe, portant un chapeau en vison et un cache-main) est d'une beauté irrésistible ; la comparaison entre Galaxy Express1999 et Le Tour du Monde en 80 Jours (de Jules Vernes, pas le manga) n'est pas toujours usurpée. En bref, une série vraiment pas si mal et, si vous me permettez un avis personnel, méritant d'être plus connue qu'Albator.
Pour finir avec ces récits de résistance multimondes, je terminerai par le papy du genre qui a été récemment réadapté en manga : Flash Gordon. Là, je ne vous ferai nullement l'insulte de vous résumer l'histoire. Mais réfléchissez-y : l'Empereur Ming ! C'est tout ce que j'avais à dire à ce sujet. Maintenant, vous pouvez toujours arguer que la faiblesse des personnages et des intrigues aurait pu être corrigée lors de cette adaptation. Certes, mais en disant cela, je m'expose à une critique légitime : pourquoi en parler si tout a été dit ? Je vous répondrai que c'est pour y explorer une facette de toutes les japanimes de droite libérale : jamais les persos ne retourneront chez eux. Il n'y a jamais de chemin retour vers un home où les héros profiteraient d'un repos bien mérité. Je conclurai donc en rappelant la critique permanente de ces mangas de droite libérale vis-à-vis de l'autorité, si ce n'est du gouvernement. A découvrir le nombre de mangas de gauche, la précédente rubrique, bien que d'une longueur raisonnable, va vous paraître ridicule de brièveté. Pour les mangas " de gauche ", le gouvernement est la réponse à tous les maux de l'univers. Il crée des structures plus ou moins légales pour combattre le crime, il régule les activités extra-terrestres répréhensibles et ses moyens sont le voyage temporel. C'est le cas de l'archétype ultime : Capitaine Flam. " Quand la société intersidérale n'a plus aucun espoir... ". Cela présume à la fois la légitimité d'un gouvernement (ici la société Galactique, une sorte d'ONU), mais aussi une action de ce gouvernement vis-à-vis des problèmes qui lui sont présentés. Tout à l'heure, je parlais de voyages temporels, c'est exactement ce dont il s'agit dans Capitaine Flam (qui se nomme Captain Future dans sa version originale). Avec son cyberlab, le Capitaine Future, né Curtis, voyage à travers les galaxies et les époques. Les histoires, bien que parfois abracadabrantes, s'améliorent d'épisode en épisode. Quant à la bande son, vous avez déjà deviné mon avis sur la question, vous qui avez lu l'intro ! Même sans cela, cette série est de très bonne facture, en autres, pour le nombre de ses personnages principaux. Si ces derniers ne s'entendent pas beaucoup entre eux... ils s'adorent (je parle de Malah et l'androïde Krahag). Ce dessin animé est vraiment novateur avec le personnage de Frégolo, une réelle utilisation du thème de l'androïde sortant quelque peu des sentiers battus : c'est un perso comme un autre et non un golem sans coeur ou une machine en quête d'humanité. Le fait que, dans Capitaine Flam, la portée des intrigues ait une influence sur l'univers entier, me plaît beaucoup. A quoi sert d'avoir des armes puissantes, de l'équipement si c'est pour faire en sorte qu'une simple histoire d'amour ait lieu ? Autre aspect plaisant : quand le cyberlab voyage dans le temps, le spectateur a alors une vision assez impressionnante du continuum espace-temps en train d'être remonté. Cela préfigure beaucoup de versions de voyages spatio-temporels dont celui de Stargate. L'atmosphère d'action pure de Capitaine Flam est facilement adaptable. Par contre, le manque impardonnable de combats spatiaux dignes de ce nom est vraiment regrettable (tout comme la bande son). A part ça, l'esthétique et la variété des mondes parcourus n'ont rien à envier au meilleur des Flash Gordon. Non, je plaisante : ils sont pas mal. Vous avez demandé la suite, ne quittez pas… |